Mali : Quid de la gestion des migrants décédés ?
La migration irrégulière est l’un des phénomènes qui gangrènent la sous-région ouest-africaine. De nombreux migrants qui traversent le désert du Sahara en direction de la Méditerranée n’arrivent pas à destination. Quid de la gestion au Mali des personnes décédées sur les routes migratoires ?
Les mouvements migratoires en Afrique de l’ouest restent complexes et parfois périlleux. Alors que les statistiques montrent que 88% des flux migratoires étaient internes à la région en 2021, de nombreux migrants sont signalés décédés ou disparus le long des routes migratoires, y compris celles en provenance de l’Afrique de l’Ouest, au moment qu’ils tentent de traverser le désert du Sahara vers l’Afrique du Nord pour l’Europe.
Selon le Projet Migrants Disparus de l’OIM, 3 136 décès et disparitions de migrants ont été enregistrés sur routes en provenance d’Afrique de l’Ouest et du Centre. « La moitié de ces décès sont survenus lors de tentatives de traversée du désert et un sur dix a eu lieu sur la route maritime vers les Îles Canaries après avoir quitté l’Afrique de l’Ouest », indique le rapport.
Le Mali, connu comme pays de tradition migratoire, est à la fois une terre de départ, de transit mais aussi de retour de migrants. Si aucune donnée exacte de migrants décédés n’existe, force est de noter qu’en seulement trois mois, pas moins de 450 décès et disparitions ont été répertoriés et documentés au Mali et au Niger. Bordj Badji Mokhtar en Algérie reste jusqu’ici l’épicentre du drame, selon le Chargé des Affaires sociales et de solidarité du HCME.
Mais, la gestion des corps demeure un défi à relever. « Malgré les chiffres alarmants révélés par la collecte de données sur les disparitions et les décès de migrants, nous sommes convaincus qu’ils ne reflètent pas la réalité du drame qui est en train de se jouer », dira Arthur Langouet de la Mission OIM-Mali.
Au Mali, le Haut Conseil des Maliens de l’Extérieur (HCME), qui joue le rôle de protection des migrants, est souvent confronté aux défis de la gestion des personnes décédées. « S’il s’agit d’une mort naturelle, il est procédé à l’enterrement de la personne en son lieu de décès, quelle que soit sa confession religieuse. Le HCME, à travers ses démembrements, s’occupe des rites funéraires, en lien avec le ministère des cultes », a fait savoir Mamadou Lamine Bane, Chargé des Affaires sociales et de solidarité du HCME.
Et celui de poursuivre : « Si le défunt a des parents dans la localité, ces derniers se chargent des autres problèmes, notamment la succession, la gestion des biens ou leur liquidation », sous l’assistance du HCME. Au cas contraire, le HCME « s’efforce d’informer la mission diplomatique ou consulaire de la juridiction, puis la famille de la personne ». Si la mort du migrant n’est pas naturelle, le HCME, en lien avec les autorités locales, cherche à comprendre les causes du décès, précise-t-il.
Selon le Chargé des Affaires sociales et de solidarité du HCME, l’identification des corps de migrants décédés est un souci majeur dans cette gestion. « Souvent, le corps est découvert plusieurs jours ou semaines, voire mois. Si la personne n’a pas de pièce d’identité sur elle, son identification pose de problème », fait-il savoir. Il est engagé alors une autopsie avant l’inhumation du corps sous l’autorisation du procureur de la juridiction.
Du côté de la Délégation Générale des Maliens de l’Extérieur, dont la mission d’élaboration des éléments de la politique nationale de migration en matière d’administration d’assistance, de protection et de promotion des Maliens de l’Extérieur et d’assurer la coordination de la mise en œuvre de cette politique, aucune statistique de migrants décédés n’existe, a indiqué un de ses responsables.
Somme toute, la gestion par le Mali des migrants décédés est handicapée par des « difficultés liées aux collectes peu régulières, à l’absence de consolidations et à l’insuffisance de partage, aux lacunes relatives à la gestion des corps retrouvés sur les routes migratoires, l’accompagnement dans la recherche des contacts familiaux ou l’absence de mécanismes d’orientation des cas solides dans les endroits où l’on recueille déjà des données ».
Toutefois, un des jalons en réponse à cette problématique a été posé le OIM-Mali avec les acteurs en charge de la migration.
Cyril Adohoun
Source : www.maliexpress.net