Transition et gouvernance vertueuse : La justice pourrait-elle redorer son blason ?

L’Etat de droit peut-t-il se concevoir sans une justice qui rassure les justiciables ? Comment l’institution judiciaire peut-elle atteindre cet objectif, durant cette transition, lorsqu’elle continue d’essuyer autant de récriminations ?

Si transition rime avec rupture dans la gouvernance, cela devrait passer par une justice réhabilitée, plus assainie et plus crédible. Mais, à l’analyse, la machine judiciaire du Mali ne semble pas avoir fait la mutation souhaitable. Elle donne plutôt l’impression d’être un épouvantail, qui fait peur…

En effet, plus d’un citoyen tremble devant la machine judiciaire ; alors que celle-ci est censée protéger tout le monde. Et l’un des facteurs motivant cette peur du justiciable est la lenteur excessive des procédures. Ce qui fait que même les personnes qui jurent de leur innocence décrient le temps d’une inculpation presque abusive où la détention préventive apparaît comme un temps de punition imméritée, dons injuste !

Ce phénomène défraie la chronique particulièrement durant la transition en cours. Puisque cette période est celle où le peuple s’attend à plus de justice et d’équité dans la conduite des affaires publiques. Ce qui est marqué par l’ouverture ou la réouverture de plusieurs de dossiers, dont des cas présumés de détournements de deniers publics. Ces affaires ne devraient-elle pas connaître la diligence nécessaire pour situer les uns et les autres sur la culpabilité ou non de tels ou tels cadres (anciens ministres ou hauts responsables de l’Etat) ? Cela n’est pas le cas. Hélas !

Dans une récente lettre ouverte adressée au chef de l’Etat, l’ancienne ministre de l’Economie et des finances, Mme Bouaré Fily Sissoko déplore une justice presque expéditive qu’équitable. « Il faudrait que nos concitoyens gardent à l’esprit qu’une Chambre d’instruction a vocation à instruire les dossiers à charge et à décharge et que, par conséquent, la présomption d’innocence devrait prévaloir pour tout inculpé, quelles que soient les rancœurs des uns et des autres à son égard » Et la ministre inculpée dans le dossier de l’achat de l’avion présidentiel et du protocole d’achat d’équipements militaires entre le ministère de la Défense et la société Guo Star, sous feu le président IBK, d’ajouter : « Je regrette que l’institution judiciaire ne mette pas souvent l’accent sur cet aspect. Jetant de fait, en pâture des citoyens dont la culpabilité reste à être prouvée ».

Ce cri de détresse de cette justiciable traduit une opinion largement répandue, selon laquelle, l’appareil judiciaire est plus prompt à jeter les inculpés et mêmes les simples suspects dans la gueule du loup, plus pressé de châtier que d’aider promptement à la manifestation de la vérité. Cette appréhension est plus qu’une réalité surtout si les dossiers concernés ont quelques connexions avec des chapelles politiques. Ce qui est dommageable pour la construction de l’Etat de droit auquel aspire le peuple.

En outre, l’on déplore souvent que la justice a du mal à s’affranchir du courant de pensé dominant véhiculé par le pouvoir du jour. A titre d’exemple, quand il s’est agi de réaffirmer l’autorité de l’Etat, depuis les derniers mois de la gouvernance IBK, l’on a assisté à de nombreuses interpellations judiciaires (hâtives), dont certaines ont suscité des remous au sein des associations de défense des droits humains. Cette dynamique s’est poursuivie et même renforcée drastiquement après les événements du 18 août 2020.

Que de cas d’atteintes à certaines libertés fondamentales comme la liberté d’expression ? Tout cela appelle à tempérer les ardeurs pour assurer durant la transition en cours une justice plus soucieuse de son image et de sa réputation. C’est cela qui renforcera les efforts pour la refondation. Surtout que l’injustice est le terreau de l’instabilité.

Boubou SIDIBE /maliweb.net

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