Apaiser le climat sociopolitique, instaurer un dialogue constructif et durable entre les acteurs sont des impératifs pour l’organisation réussie des prochaines élections au Mali.
La tenue des prochaines élections au Mali demeure une préoccupation majeure des populations et particulièrement de la classe politique, issue du Cadre d’échange des partis politiques et regroupements politiques pour une transition réussie. Aussi, au sein de l’opinion publique où des voix s’élèvent pour demander aux autorités de la transition d’accélérer la cadence pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel.
Ainsi donc, au niveau gouvernemental, des initiatives se multiplient pour convenir sur l’essentiel, pouvant permettre d’aller aux élections et garantir sa crédibilité.
Initié par le Comité de plaidoyer et de suivi des reformes électorales, un forum consacré à l’apaisement du climat sociopolitique a eu lieu à Bamako, le mardi 1er Novembre dernier, présidé par Ibrahim Ikassa Maiga, ministre de la refondation de l’Etat, chargé des relations avec les institutions.
Faut-il rappeler que l’objectif dudit forum vise à contribuer à l’instauration d’un dialogue constructif et durable entre acteurs civiques et politiques pour favoriser une dynamique consensuelle autour des réformes politiques et institutionnelles.
Les ministères de tutelle, le Conseil national de Transition, les partis politiques, la société civile, les autorités traditionnelles et religieuses, la presse et les partenaires techniques et financiers, durant deux (2) jours, ont convenu sur la nécessité d’instaurer et de maintenir un dialogue constructif.
Fait majeur, une rencontre portait sur les modalités du vote des éléments des forces de défense et de sécurité en mission de sécurisation du processus électoral a été organisée en novembre dernier. En effet, le vote des éléments des forces de défense et de sécurité en mission lors du scrutin, sur les théâtres des opérations ou en mission commandée, est régit par les dispositions de l’article 116 de la loi N°2022 /0019 du 24 Juin 2019 portant loi électorale.
Propositions des participants
«Au regard de la situation sécuritaire de notre pays, la sécurisation des centres et des bureaux de vote sur toute l’étendue du territoire national requiert la mobilisation en grand nombre des éléments des forces de défense et de sécurité », reconnait le Premier ministre par intérim Abdoulaye Maiga. A ses dires, ‘’il est difficile que les éléments de forces de défense et de sécurité accomplissent leurs devoirs civiques le même jour que les autres composantes de la population tout en assurant la sécurité des bureaux de vote, des votants et assurer également la sécurité des positions militaires’’.
Pour corriger les insuffisances d’application des dispositions de l’article 116 de la loi électorale, qui connait de sérieuse limite quant au nombre d’éléments des forces de défense et de sécurité qui seront amenés à exercer leurs droits de vote, des propositions ont été faites par les participants.
Il s’agit entre autre, le vote par SMS, le vote par anticipation, la centralisation électronique, la création de centres spécifiques de vote pour les forces de défense et de sécurité et l’application stricte de la loi électorale. Dans cette même veine, la question sur le vote des déplacés était aussi au cœur d’un atelier, organisé par IFES et CMIDD, le mercredi 9 Novembre dans un hôtel de la place.
Observateur de la scène politique, Mamadou Sidibé estime que l’organisation de la prochaine élection doit être inclusive sans exclusion aucune d’acteurs politiques. « Personne ne peut parler d’élection sans les politiques. Moi je ne suis pas politique. Il faut une représentativité à tous les niveaux de l’Etat, c’est comme ça que les choses marchent », a-t-il souligné.
Quid du respect du chronogramme
Des interrogations légitimes ? Certains parlent même de retard accusé dans la mise en œuvre du chronogramme électoral. Est-ce le cas ? Quelques pistes. Après moult tractations, le ministère de l'Administration territoriale et de la Décentralisation a présenté en juin 2022 un projet de chronogramme des différents scrutins ainsi que des réformes politiques et institutionnelles. Le projet en question est détaillé comme suit: « Le scrutin du référendum aura lieu au mois de mars 2023, la convocation du collège en février 2023, l'examen et l'adoption en mai 2023. Pour les élections des conseillers des Collectivités territoriales, la convocation est prévue en mars 2023, la campagne électorale en juin 2023 et le déroulement du scrutin au même mois de juin », explique-t-on au sein de la transition.
En pratique, le gouvernement a proposé le mois de juillet 2023, pour les élections des députés dont la campagne électorale va se dérouler en octobre 2023 et le scrutin du premier tour au même mois d'octobre tandis que le second tour est fixé pour le mois de novembre et la campagne électorale du second tour en novembre.
Pour ce qui est de la tenue de l'élection du Président de la République, le collège est convoqué en octobre 2023, la campagne électorale du 1er tour et du second tour est fixée en février 2O24. De cette annonce à nos jours, qu’est-ce qui a changé sur le terrain ?
Du coup, certains évoquent des doutes qui pèsent lourdement sur le respect du calendrier électoral et la tenue des élections aux dates indiquées. Des arguments ne manquent pas puisque prévu pour Juillet 2022, le décret de nomination des membres de l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE) n'a vu le jour finalement qu’en Octobre, soit 3 mois après.
Désormais, en charge des prochaines élections au Mali, l’AIGE mise en place et dirigée par Me Moustapha Cissé, demeure embryonnaire, du moins à l’état actuel des choses. Ses démembrements qui doivent être érigés dans le District, les régions, les cercles, les communes, les ambassades et consulats ne sont toujours pas installés. Pourtant, ce processus était prévu au plus tard le 2 août 2022.
Retour à l’ordre constitutionnel
Le Cadre d’échange des partis et regroupements politiques pour une transition réussie, la principale force d’opposition au pouvoir, multiplie des initiatives de rencontre pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel. Après de larges concertations à l’interne, très récemment, les responsables du Cadre sont partis à la rencontre des leaders de la société civile, notamment l’imam Mahmoud Dicko et autres. En clair, ce regroupement entend faire le constat de l’état de la nation et recueillir des idées pertinentes de propositions de sortie de crise.
Lors de leur rencontre avec le Premier ministre par intérim Abdoulaye Maiga, ces responsables du Cadre ont saisi l’occasion pour lui remettre leurs propositions écrites du retour à l’ordre constitutionnel et de la formation d’un nouveau gouvernement dirigé par un Premier ministre neutre. Cette option est vouée à l’échec pour l’instant, puisque le chef du gouvernement après un repos forcé de plusieurs mois est revenu à la primature. Comme pour dire qu’il bénéficie encore de la confiance du chef de l’Etat.
Avant même son retour, au sein du M5-RFP, la branche proche de Choguel Kokala Maïga, la proposition d’un gouvernement dirigé par un Premier ministre neutre ne semble pas passer. Ces derniers soutiennent toujours le retour de leur mentor à la Primature.
Venue rencontrer à Bamako les autorités de la transition, le 29 Novembre dernier, la délégation de la CEDEAO conduite par Goodluck Jonathan a estimé que beaucoup reste à faire. « Il y a certes des progrès qui sont enregistrés çà et là et nous sommes d’avis avec les autorités qu’elles fournissent des efforts évidemment, il reste des domaines dans lesquels il faut mettre l’accent, travailler davantage », déclare l’ancien président du Nigeria. Inutile d’affirmer que le chef de la mission de la CEDEAO pour le Mali en demandant de mettre l’accent sur certains domaines et travailler davantage, fait allusion à l’organisation des prochaines élections. Faut-il dire que l’organisation des prochaines élections devient une équation à double inconnues?
D’ici là, les regards sont tournés vers Koulouka, siège du trône présidentiel, dans l’espoir que le locataire Assimi Goita va insuffler du vent nouveau dans la conduite des affaires publiques. Il est scruté de toute part et invité à reprendre la main, une nouvelle fois.
F.T avec Maliexpress.net