Les jeux de paris ont toujours existé au Mali. Le PMU-Mali depuis des décennies côtoie l’habitude des citoyens. Cependant, ces dernières années avec la montée en puissance des téléphones intelligents, les entreprises focalisées sur les paris ont pris un nouveau visage en créant des applications téléphoniques pour jouer en ligne. Ce facteur ne respecte en aucun cas la limite d’âge pour accéder aux jeux qui y sont inclus. Résultat : la quasi-totalité de la jeunesse de notre capitale est de facto devenue accroc à ses jeux en ligne.
Attirés par la facilité et l’appât du gain, ces parieurs dont la moyenne d’âge varie entre 16 et 40 ans dilapident ainsi leurs maigres revenus. De ce fait, poussés par la volonté de se faire des millions en un laps de temps, ils se font constamment dépouiller par ces entreprises de jeu. Outre les téléphones, les salles de jeux ont poussé comme des champignons dans toutes les communes de Bamako.
Allant du simple football au basket ou au casino, toutes les formes de jeu se retrouvent aujourd’hui dans le Premier Bet. Tout est mis en œuvre par les développeurs de ces applications pour appauvrir une jeunesse qui croule sous le poids du chômage et de la précarité.
Les mises commencent à partir de la modique somme de 100 F CFA avec la possibilité d’être élargies jusqu’à des millions. En un clic, les joueurs voient leur solde décroître de façon incroyable au grand bonheur des gérants de ces paris. Cependant, quelques gains laissent entrevoir une chance de remporter le jackpot. Cela est une façon d’appâter les potentiels joueurs, mais c’est un coup de bluff.
Gérant d’une salle de course en directe, notre interlocuteur qui préfère garder l’anonymat parle d’un système à grande échelle. Selon lui, tout est mis en œuvre pour que les parieurs misent une importante somme d’argent pour ne récolter que des miettes. Dans ses aveux, il reconnaît que cette stratégie répandue dans notre pays fait gagner des milliards sur le dos des pauvres.
Spirale dangereuse
"Parfois, on à des clients qui viennent miser le prix de leurs condiments ici et rentrent bredouilles chez eux en sachant bien sûr que leurs familles resteront dans la faim. Ça me fait vraiment de la peine en voyant cela mais je ne peux rien faire. Étant gérant d’une de ses salles, ce n’est pas mon travail de refouler les clients car je suis payé par ce système".
Le constat général est alarmant. Le nombre de joueurs ne fait qu'accroître et il règne une omerta incompréhensible sur le sujet. A partir d’un simple téléphone portable, on peut ainsi dilapider des centaines de millions en jouant au casino ou en misant sur des courses en direct. Les conséquences de ces pratiques peuvent être désastreuses pour l’avenir de la jeunesse. Certains joueurs sont prêts à tout pour obtenir de l’argent quitte à voler.
Interrogé par nos soins, un habitué raconte sa mésaventure. "J’ai commencé à jouer avec une mise de 10 000 F CFA. Quand je les ai perdus, je voulais coûte que coûte gagner ce que j'avais perdu. Au fur à mesure que je jouais, je perdais encore beaucoup d'argent. Au bout du compte, je me suis retrouvé les mains vides après avoir dilapidé 150 000 F CFA. Le comble, c’est que cette somme ne m’appartenait même pas. Je voulais juste tenter ma chance et gagner un petit surplus puis déguerpir. Malheureusement, j’ai été pris au piège. L’ironie de l’histoire c’est que plus tu perds de l’argent, plus tu es déterminé à jouer. Ainsi, au bout du compte, tu te retrouves complètement plumé".
Plusieurs témoignages convergent dans le même sens, ainsi, nous interpellons les autorités à jeter un regard sur ce fléau qui détruit à petit feu la jeunesse malienne.
Ahmadou Sékou Kanta
Source : Miroir Hebdo