Espagne : un Malien décède dans un centre d’accueil à Madrid
Diallo Sissoko est mort, lundi, dans le centre d’accueil pour migrants d’Alcalá de Henares à Madrid. D’après l’ONG présente dans la structure, il serait décédé d’une embolie pulmonaire. Le jeune malien se plaignait depuis plusieurs jours de douleurs, soignées avec des analgésiques.
Diallo Sissoko a survécu à la traversée de l’Atlantique mais a finalement trouvé la mort dans un centre d’accueil en Espagne. Ce jeune Malien de 21 ans est décédé lundi 21 octobre dans le centre d’urgence, d’accueil et de référence (CAED) d’Alcalá de Henares à Madrid. Il y était hébergé depuis mi-septembre, après son transfert de l’île d’El Hierro, aux Canaries, où il était arrivé le 27 août.
La cause du décès est encore inconnue, le temps que les résultats de l’autopsie soient dévoilés. Mais d’après un rapport rédigé par l’Accem, l’ONG présente dans la structure de 1 500 places, Diallo Sissoko serait mort d’une embolie pulmonaire.
Avant de mourir, le jeune homme a subi une “longue agonie”, affirme El Pais. Six jours avant son décès, il est transféré à l’hôpital Príncipe de Asturias pour des douleurs à la poitrine et à la jambe. “Il en revient dans la nuit avec un diagnostic d’infection respiratoire non pneumonique et un traitement antalgique, sans antibiotiques”, explique l’Accem dans son rapport, consulté par l’agence de presse EFE.
Deux jours plus tard, le 17 octobre, le Malien se rend à l’infirmerie du centre, sa douleur à la jambe étant “toujours intense”. “Nous lui avons donné des béquilles, espérant que les analgésiques et la crème prescrits par les médecins soulageraient la douleur”, indique encore l’ONG. Le rapport précise aussi que l’exilé, à ce moment-là, ne présentait aucun signe d’inflammation, ni de difficulté respiratoire ou tout autre critère justifiant son orientation vers l’hôpital, “malgré la persistance de symptômes tels que la douleur”.
“Arrêt cardiorespiratoire”
Le lendemain, le 18 octobre, l’équipe médicale du centre l’ausculte à nouveau et “comme la douleur persiste, l’analgésique est renforcé”. Puis le jeune homme “prend ses médicaments normalement tout le week-end”.
Le 21 octobre à 7h45, il se rend une nouvelle fois à l’infirmerie, la douleur ne passant pas. D’après l’ONG, “différents tests ont été effectués”, mais Diallo Sissoko reste dans le local car son genou droit lui fait encore très mal. Il commence aussi à souffrir d’hypotension. L’Accem appelle alors une ambulance, et tente de faire repartir sa tension. Mais le jeune homme “quitte le centre en arrêt cardiorespiratoire”.
Aux urgences, le personnel soignant passe plus de quatre heures et demie à tenter de le réanimer. Vers 12h50, les médecins annoncent à l’ONG que Diallo Sissoko est décédé.
“Service médical très basique”
À l’annonce de la nouvelle, le groupe parlementaire Sumar (coalition de gauche) a transmis des questions au Conseil du Congrès des Députés, dans lesquelles il affirme “soupçonner que l’inflammation de la jambe pouvait être une thrombose, provoquant une embolie pulmonaire”. De leur côté, des sources du ministère de l’Inclusion, de la Sécurité sociale et des Migrations, contactées par EFE, ont déclaré attendre l’autopsie pour obtenir plus d’informations.
Mercredi 23 octobre, un groupe de ressortissants maliens ont protesté devant le CAED, surveillés par cinq voitures de police et des dizaines d’agents, a constaté El Pais. “C’est toujours très difficile d’obtenir un rendez-vous [médical] et il n’y a jamais suffisamment de médicaments”, déplore un camarade de Diallo Sissoko.
“Ces jeunes arrivent dans des états de souffrance extrême, affirme un membre de l’équipe médicale interrogé par le journal. Ils ont des infections buccales, des blessures, et des insuffisances rénales après des jours de traversée à boire de l’eau de mer. La nuit, ils ont eu froid, et contractent des pharyngites, des inflammations des amygdales. Et nous, on fournit un service médical très basique et souvent, on doit insister [auprès de la direction] pour les transférer à l’hôpital”. Un dernier point que nie la direction.
Un système de santé “dépassé”
L’Espagne, via la route des Canaries, est un point d’entrée en Europe pour des milliers de migrants chaque année. Depuis le 1er janvier, plus de 42 000 personnes sont arrivées dans le pays, dont 30 000 par l’archipel situé dans l’océan Atlantique.
Parmi eux, de nombreux mineurs. Et ces arrivées font pression sur le système d’accueil des Canaries, notamment sur celui réservé aux mineurs non accompagnés. Conséquence, les services de santé de l’archipel sont “complètement dépassés”, avoue le pédiatre Abián Montesdeoca au média Cadena Ser. “Il est triste de voir qu’un pays avec un niveau de développement comme le nôtre n’est pas capable de soigner […] ces mineurs”.
D’après le médecin, certains jeunes arrivent très mal en point aux Canaries, n’ayant pas pu traiter leur pathologie dans leur pays d’origine. À cela s’ajoutent “l’hypothermie, la déshydratation, les blessures et les infections qu’ils ont contractées en mer”.
Le trajet jusqu’aux Canaries dure plusieurs jours, dans une embarcation à la merci des intempéries et des forts courants. La soif, la faim, les brûlures du carburant rendent la traversée cauchemardesque, pour ceux qui y survivent.
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