G5 SAHEL : Le déclin irréversible
Le G5 Sahel, créé en 2014 dans le but de lutter efficacement contre le djihadisme dans la région, semble connaître un déclin irréversible avec le départ successif du Mali en mai 2022, suivi maintenant par le Niger et le Burkina Faso. Cette série de retraits soulève des interrogations quant à la viabilité et à la pertinence de cette organisation.
Initialement composé de cinq pays – la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad -, le G5 Sahel a perdu deux membres de plus, ne laissant que deux pays aujourd’hui. Cela soulève légitimement des questions sur la capacité de l’organisation à atteindre ses objectifs, notamment dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Malgré les moyens considérables mis à sa disposition, la force antijihadiste du G5 Sahel n’a jamais réussi à s’affirmer efficacement sur le terrain.
Le retrait du Burkina Faso et du Niger, dirigés également par des gouvernements militaires, renforce leur volonté de travailler en tandem, illustrée par la signature en septembre d’un pacte de défense mutuelle, l’Alliance des États du Sahel (AES). Ce départ marque également une rupture croissante avec les partenaires occidentaux, en particulier la France, qui avait initialement soutenu le G5 Sahel.
En 2017, le G5 Sahel s’était doté d’une force militaire conjointe financée en grande partie par des partenaires internationaux, notamment l’Union européenne. Cependant, le lancement de cette force a été marqué par des difficultés opérationnelles majeures. Le quartier général de la force, basé au Mali, a été attaqué trois jours après son officialisation, entraînant la mort de plusieurs personnes et la nécessité de déplacer le commandement à Bamako.
Les tensions entre les États du G5 Sahel et leurs partenaires étrangers se sont également intensifiées en raison du retard dans la concrétisation des promesses de dons. Moins de la moitié des 418 millions d’euros promis par la communauté internationale a été versée près de deux ans après la création de la force conjointe. Cette situation a été critiquée par certains membres du G5 Sahel, dont l’ancien président nigérien Mahamadou Issoufou, qui a souligné la nécessité d’un financement pérenne pour assurer la durabilité et l’autonomie de la force.
La détérioration des relations entre la France et le Mali, en raison des événements politiques au Mali en 2020 et 2021, a également joué un rôle crucial dans l’affaiblissement du G5 Sahel. Le Mali avait déjà quitté l’organisation en mai 2022, dénonçant des manœuvres visant à l’isoler.
Le communiqué conjoint du Burkina Faso et du Niger, annonçant leur retrait le 1er décembre, souligne que le G5 Sahel ne doit pas « servir les intérêts étrangers au détriment de ceux des peuples du Sahel ». Ce constat général pointe du doigt l’inefficacité de l’organisation, en particulier de sa force conjointe, dans la lutte antiterroriste, selon plusieurs observateurs.
La question cruciale aujourd’hui est de savoir si le G5 Sahel pourra survivre à ces départs successifs et à ses propres lacunes opérationnelles. Les signes ne sont guère encourageants, et l’avenir de cette organisation semble plus que jamais compromis.
Ahmadou Sékou Kanta
Source : L’Observatoire