Célébrons nos héros pendant qu’ils sont parmi nous !!!
A la découverte d’un grand homme de paix : Irahim Ag IDBALTANAT, lauréat du Prix UNESCO-Madanjeet Singh 2014 pour la tolérance et la non-violence, tout comme Aung San Suu Kyi de la Birmanie.
« Il est toujours possible de régler les conflits sans la violence et aucune situation ne saurait justifier le recours à la violence car le recours à la violence c’est aussi de la faiblesse dans la mesure où ce recours à la violence ne fera qu’engendrer tôt ou tard d’autres violences. » Ibrahim Ag Idbaltanat
IBRAHIM AG IDBALTANAT, né en 1956 à TIDARMENE dans la région de MENAKA, fut tour à tour professeur de Biochimie, superviseur division Aménagements hydro agricoles de World Vision Internationale à Ménaka, puis Directeur par intérim de ladite organisation. En 1990, il devient le Président Directeur Général de l’ONG GARI, une organisation nationale de développement intervenant dans la Région de Gao, en particulier dans les cercles de Ménaka, Ansongo et Gao.
Président Fondateur de l’Association Temedt en 2006, une organisation œuvrant pour la consolidation de la Paix, le Développement, la Protection et la promotion des droits humains et qui compte plus de 40 000 membres, Ibrahim Ag IDBALTANAT à travers cette structure n’a de cesse pousser les horizons, afin que le Mali compte parmi les nations prospères.
Grâce à ces efforts inlassables pour un monde meilleur, il est élu Fellow Ashoka (Innovateur Social de la Fondation Ashoka dont le siège est à Washington), afin de reconnaitre l’impact du combat de notre héros, mené pour la promotion et la protection des droits humains au Mali, surtout dans la lutte contre l’esclavage par ascendance.
Dopé par la reconnaissance de sa lutte au profit du bien-être des populations au niveau international, Ibrahim IDBALTANAT a multiplié les initiatives dans le cadre de la promotion des droits humains au Mali, toute chose qui, en Octobre 2012, le conduit au rendez-vous avec l’histoire une fois de plus, avec le Prix Antislavery international de Londres, en reconnaissance du combat mené pour l’éradication de l’esclavage par ascendance au Mali.
Ce parcours, exceptionnel pour un Africain d’un pays francophone d’Afrique, propulsa Ibrahim Ag IDBALTANAT au-devant des scènes où l’humain est célébré. Partant, il intègre le panthéon des immortels en Novembre 2014, en devenant Lauréat UNESCO 2014 du Prix Mandaajet Singh pour la Promotion de la tolérance et de la non-violence. Ce, en reconnaissance de sa contribution exceptionnelle à la consolidation de la paix et à la résolution des conflits entre les différents groupes de la société malienne à travers le dialogue, le respect de la diversité culturelle et la participation inclusive de tous les membres de la communauté dans le processus de prise des décisions, tout comme Aung San Suu Kyi en Birmanie.
Ce Prix salut également son engagement de longue date et un travail courageux en tant que militant de la société civile pour la promotion des transformations sociales positives, de l’inclusion sociale et de la justice, ainsi que ses efforts pour aider les groupes les plus marginalisés et les plus défavorisés de la société, y compris les femmes, les enfants, et les descendants d’esclaves au Mali.
D’ailleurs, lors de la remise du Prix à l’UNESCO à travers son allocution, nous pouvons apprécier la grandeur de cet homme modeste, qui se présente désormais comme un chemin vers l’humain : « Au-delà de l’activiste qui ne serait allé nulle part sans l’aide des autres, vous distinguez des personnes dévouées des communautés du Mali, en particulier des communautés du Nord de mon pays, sans distinction d’ethnie, de tribu, de sexe, de religion ou d’âge. Vous distinguez aussi ma famille, mes collègues de Temedt, de GARI et tous nos soutiens, leur accompagnement a été déterminant pour être là aujourd’hui. Avant 1985, lorsque conscient que sans l’éducation des communautés rurales, le progrès de mon pays n’était pas possible, j’ai mis fin à mes ambitions de carrière, pour retourner enseigner aux enfants dans les paillotes et sous les arbres. Je n’étais pas seul.
J’étais avec des amis convaincus, mobilisés, entièrement dévoués à la cause de leurs frères et sœurs. Beaucoup d’entre ces amis sont restés mobilisés ; vivant au milieu des leurs, ils n’ont pas eu la notoriété qui m’a été donné. Mais ce sont eux qui méritent aujourd’hui ce prix Madanjeet Singh pour la promotion de la Tolérance et de la Non-violence.
En 1985, lorsqu’à la tête d’un petit groupe dont le bétail venait d’être décimé par l’une des sécheresses les plus impitoyables du Sahel, je proposais de dompter une nature ingrate avec des ouvrages de conservation des eaux et des sols. J’étais en compagnie d’autres ressortissants du Sahel qui ne voulaient pas s’avouer vaincus ou dépendre de l’aide alimentaire de la Croix-Rouge. Puis pendant plusieurs décennies, parce que la fierté, la dignité, l’honneur de tous et de toutes méritent d’être défendus et que nos sangs se valent, au-delà de nos différences, j’ai porté avec d’autres le combat pour le respect de tout homme, de toute femme. Vous permettrez que je les associe à ce prix, je sais que sur les dunes et les oueds qu’ils parcourent tous les jours pour pouvoir vivre dignement, ils partagent avec nous ce moment exceptionnel. »
Mieux, questionné un jour par des confrères, à savoir s’il est toujours possible de régler les conflits sans violence, et s’il existe des situations qui justifient le recours à la violence ; la réponse de Ibrahim Ag IDBALTANAT s’est gravée dans le marbre et constitue une leçon d’histoire pour l’instant et pour l’avenir : « Oui, il est toujours possible de régler les conflits sans la violence et aucune situation ne saurait justifier le recours à la violence car le recours à la violence c’est aussi de la faiblesse dans la mesure où ce recours à la violence ne fera qu’engendrer tôt ou tard d’autres violences.
En fait à chaque cas de conflit, il existe une approche pour le résoudre et tant que cette approche de solution n’est pas trouvée le conflit demeurera, soit de manière ouverte soit de manière latente. Parfois il peut aller à des métamorphoses qui ont tendance à faire croire qu’on a à faire à de nouveaux types de conflits. C’est pourquoi la résolution des conflits nécessite de l’intelligence et de la patience. »
De l’intelligence et de la patience, nous en avons besoin en ces moments d’incertitude pour les pays du Sahel et leurs populations, afin d’éradiquer les foyers de conflits et d’avoir le temps pour la célébration de l’humanité.
Aujourd’hui, si la communauté internationale a su rendre à l’homme l’honneur qu’il mérite à travers tous les prix qui le célèbrent, en tant qu’acteur de la paix, pourquoi ne pas l’honorer à notre tour et mettre son expérience au profit du Mali, pour la consolidation de la Paix et du vivre-ensemble.
Malick Maïga