Abandon du Plan Rwanda : Kigali prévient qu’elle ne remboursera pas l’argent versé par Londres

Abandon du Plan Rwanda : Kigali prévient qu’elle ne remboursera pas l’argent versé par Londres

Après la défaite des conservateurs au Royaume-Uni, et l’annonce de la fin du Plan Rwanda par le nouveau gouvernement travailliste au pouvoir, Kigali a mis les points sur les i : « Le remboursement de l’argent n’a jamais fait partie de l’accord ». Londres avait versé 280 millions d’euros au Rwanda pour que le pays africain prenne en charge les migrants arrivés illégalement sur le sol anglais. Et espérait les récupérer.

« I want my money back », avait lancé l’ancienne Première ministre Margaret Thatcher, en 1979. Quarante-cinq ans plus tard, les travaillistes reprendront-ils la célèbre formule de la Dame de Fer ? Arrivé au pouvoir après 14 ans de règne conservateur, le nouveau Premier ministre du Labour, Keir Starmer, a annoncé l’abandon du controversé Plan Rwanda et aimerait bien que l’argent investi à Kigali revienne dans les caisses de l’État.

Pas question, a répondu en substance le Rwanda, mardi 9 juillet. « L’accord que nous avons signé ne stipulait pas que nous devrions rendre l’argent », a expliqué le porte-parole adjoint du gouvernement rwandais Alain Mukuralinda, à la télévision d’État.

Pour rappel, le plan Rwanda visait à expulser vers le pays d’Afrique de l’Est les migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni, via la Manche notamment. Le nouveau dirigeant travailliste a affirmé que ce projet, défendu depuis des années par les conservateurs, était « mort et enterré ». Or Londres a déjà versé 240 millions de livres sterling (280 millions d’euros) à Kigali – depuis que l’ex-Premier ministre Boris Johnson l’a lancé en avril 2022.

Des fonds censés couvrir les frais d’hébergement des migrants expulsés
« Que ce soit clair, le remboursement de l’argent n’a jamais fait partie de l’accord », a insisté Alain Mukuralinda.

À quoi servaient ces 280 millions d’euros ? Ils étaient notamment censés couvrir les frais liés à l’hébergement des migrants en provenance du Royaume-Uni. Le Rwanda s’était lancé par exemple dans la construction d’un grand lotissement de maisons appelé Bwiza Riverside Estate, en banlieue de la capitale, dont une partie était réservée aux personnes qui obtiendraient le statut de réfugié.

InfoMigrants s’était rendu à Kigali et avait pu visiter ces différentes habitations : des maisons très modernes, aux murs blancs, certaines avec une très belle vue sur les collines alentours. Avec l’annulation du Plan Rwanda, ces logements seront donc attribués, dans leur totalité, aux Rwandais.

Avorté avant même sa mise en application, ce plan faisait polémique depuis son lancement. La Cour suprême du Royaume-Uni avait décrété en novembre dernier que ce projet de loi, visé par une série de contestations devant la justice, était illégal au regard du droit international. Mais en avril, le Parlement britannique l’avait finalement approuvé après une interminable bataille entre la chambre haute, réticente face à ce texte, et la chambre basse. Des vols vers Kigali étaient même prévus en ce mois de juillet. Sans succès. Rishi Sunak, l’ancien Premier ministre, espérait aussi envoyer 5 700 migrants en 2024 au Rwanda. En vain.

Pas de voies légales de passage non plus avec les travaillistes
L’immigration est devenue une question politique de plus en plus centrale depuis que la Grande-Bretagne a quitté l’Union européenne en 2020, en grande partie sur la base d’une promesse de « reprise de contrôle » des frontières du pays.

Pour autant, s’il abandonne le Plan Rwanda, Keir Starmer ne compte pas non plus changer la politique migratoire menée par ses prédécesseurs. Le nouveau chef du gouvernement souhaite au contraire multiplier les accords européens et bilatéraux, pour enrayer les départs de migrants depuis les côtes françaises. Il y a quelques jours, il s’était dit d’ailleurs prêt à travailler avec le Rassemblement national (RN) en France si le parti d’extrême-droite était amené à gouverner à l’issue des élections législatives.

Ces dernières années, Londres et Paris avaient déjà signé des accords pour empêcher les départs de « small boats ». En mars 2023, les Britanniques ont signé un accord prévoyant de verser plus de 500 millions d’euros sur quatre ans à la France pour militariser davantage la frontière maritime. Aujourd’hui, des effectifs policiers patrouillent quotidiennement les plages du Pas-de-Calais, aidés de drones, de radars, de caméras thermiques.

Avec un succès relatif. Depuis le début de l’année, plus de 13 000 personnes ont traversé la Manche depuis les côtes françaises, soit une hausse de 18 % par rapport à la même période l’an dernier. En 2023, le Home office a recensé 36 704 arrivées irrégulières, soit un tiers (33 %) de moins qu’en 2022.

Source: Infomigrants

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